PORTRAIT – Safwen, volontaire Tunisien en Service Civique à SNT Crew

safwenSafwen a 25 ans, il est engagé en mission de service civique pour 6 mois à SNT Crew, une association affiliée à la Ligue de l’Enseignement de Basse-Normandie. Nous nous y sommes rendus pour le rencontrer et lui poser quelques questions sur son engagement.

 

Peux tu nous présenter ton parcours ?

Je viens de Tunisie, de la région de Sfax. J’ai terminé mes études de master en marketing touristique il y a 2 ans et je danse depuis fin 2003. J’ai une carte d’artiste professionnel en Tunisie. Je fais du break et je participe souvent à des événements internationaux. Je travaille depuis 2 ans dans une association artistique et culturelle au travers de laquelle j’organise un événement par an. Malheureusement, nous n’avons pas beaucoup d’aides de l’État, il y a 2-3 événements organisés par an et rien qu’à Paris, il y a 2-3 événements par week-end. C’est vraiment difficile de dire et d’assumer le fait de vouloir être danseur; c’est difficile de faire ce choix en Tunisie. Mais c’était mon rêve et c’est pour ça que je n’ai pas continué dans le tourisme. C’est un beau projet dans lequel je me suis lancé et je me donne à fond pour y arriver.

Mon premier projet date de décembre 2014 : « JAM Session » (ndlr : JAM pour Jeunes Artistes Méditerranéens). C’était un projet d’échange culturel entre la Tunisie, la France, l’Italie et le Maroc qui a duré 10 jours avec des groupes de 4 à 6 Bboys (ndlr : danseurs de break dance) pour chaque pays. Les objectifs principaux étaient de faire un échange de connaissances, de compétences, de techniques et de savoir-faire ; de mettre en valeur les traditions de chaque pays et d’accroître le sentiment d’appartenance à une identité méditerranéenne commune. C’était l’opportunité pour chaque groupe de faire un show qui les représentait en tant que pays et en tant que danseurs. J’ai monté ce projet avec le soutien de l’Institut Français de Tunisie (IFT) au travers de l’association Tunisienne « Urban Culture », fondée en 2011, dont je suis le président depuis 2014 et le porteur de projet. Entre autres, on a eu comme participant le groupe SNT de Caen (ndlr : Style & Technik : un groupe de break dance). Nous avons ensuite été sollicités pour participer à la première édition de « Battle World Unity » qu’ils ont organisée en mai 2015. C’était une grande opportunité et l’un des plus gros événements auxquels nous ayons participé. On est donc en contact avec le groupe SNT depuis la première édition de « Jam Session » en 2014. La deuxième édition a eu lieu en novembre 2015 en Tunisie à laquelle SNT a également participé. On croit au principe de l’échange et de la culture. « Each one teach one » comme l’a dit  un jour Poe One des Etats-Unis, l’un des membres fondateurs du break dance dans le monde entier.

Comment as-tu connu le programme  service civique et pourquoi avoir choisi la France ?

C’était au mois de mars ou avril 2015, via un ami qui travaille à la Maison de France à Sfax dans ma région (antenne méridionale de l’Institut Français de Tunisie). Il sait ce que vivent les danseurs en Tunisie et il savait qu’on avait la volonté et l’envie d’aller participer à des événements en Europe pour vivre et pratiquer notre passion. Il m’a parlé du service civique, du principe etc… En Tunisie ce sont l’IFT et France Volontaires Tunisie qui s’occupent des volontaires du début à la fin. Étant en bon contact avec Paul du groupe SNT, je lui ai demandé s’il connaissait ce programme. Il a apprécié l’idée et il s’est renseigné auprès de la MJC du Chemin Vert où le SNT intervient de manière hebdomadaire. Après confirmation, on a lancé les procédures mais qui ont pris du temps entre l’Institut Français en Tunisie, France Volontaires Tunisie, le groupe SNT, la Ligue de l’Enseignement, la Maison de France…

Quelles vont être tes missions?

Je vais contribuer à l’organisation des événements locaux : que ce soient des workshops dans les différentes MJC ou des petits événements ou encore des événements pour les enfants. Il y a beaucoup de groupes d’enfants et la SNT leur organise un événement de temps en temps. Je vais aussi faire des interviews avec les différents jeunes qui viennent dans les MJC pour s’entraîner, faire du hip hop etc… Et je vais clôturer ma mission par l’élaboration d’un mémoire de Hip Hop qui parle de la culture Hip Hop, comment ça a commencé, avec sûrement des interviews des premiers danseurs, comment ça s’est développé, quelles sont les perspectives etc… Il y a aussi le 10e anniversaire du SNT qui aura lieu en 2017, la deuxième édition de Battle World Unity fin 2016 ….je ne sais pas encore si je pourrais aider ou contribuer à l’organisation.

Qu’est-ce que tu attends de cette mission ?

Le grand premier pas que j’ai fait, a été grâce a l’IFT, qui m’a permis de connaître d’autres gens mais qui étaient chez nous en Tunisie. C’était un très grand encouragement et coup de pouce. Tout ce que j’ai appris en terme de montage de projet etc, c’était des formations en français, j’aime bien le français d’ailleurs. C’est un détail mais je voulais mettre l’accent dessus car ça compte beaucoup pour moi.  Je pense qu’ici je vais acquérir plein de nouvelles compétences et de connaissances en termes d’organisation, de savoir faire, de savoir-être aussi ; dans un environnement comme celui-là, avec SNT qui sont tous jeunes et très bien organisés.  Je pense que ça se passe différemment qu’en Tunisie, surtout qu’en France il y a beaucoup d’aides. Je vais me mettre à fond dans l’organisation et la gestion de projet. Là je suis dans l’aspect management et gestion. Je vais avoir de nouveaux acquis qui me serviront si je veux organiser une 3e édition de JAM Session. Ce qui serait une très grande opportunité pour  assurer la continuité et une meilleure édition.

Et après ?

Je ne sais pas encore, ça dépend. J’aimerais bien m’installer ici, surtout que je veux bien continuer à réaliser mon rêve, gagner ma vie en tant que danseur… mais je ne suis sûr de rien. Je me suis dit aussi que ce serait bien de transmettre tout ce que j’ai appris ici aux autres membres de mon association en Tunisie. Je veux aussi organiser une 3e édition de JAM Session. Donc je ne sais pas encore. J’ai entendu il y a quelques jours : « Un volontaire pour un jour c’est un volontaire pour toujours ». Pour la plupart des jeunes de mon âge en Tunisie, leur rêve c’est de terminer leurs études, de trouver un travail fixe, de fonder une famille, se stabiliser. Selon moi ce ne sont pas des rêves : ce sont des droits humains. Tout le monde a droit à ça. Moi j’ai fait le choix de m’accrocher à mon rêve et de ne pas avoir une « typical life ». Chacun a ses rêves, j’ai choisi de vivre les miens et pas ceux imposés par la société. Je me suis lancé et jusqu’à aujourd’hui ça me réussit bien.

Contact

http://snt-crew.com
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Nadia GIERLOTKA